Le cheval en Tunisie
- Un cheptel de 25 000 têtes dont 5 000 en race pure arabe et 5 000 en race barbe
- 1 200 juments reproductrices et 50 étalons en race pure arabe
- Un cheptel inscrit et contrôlé depuis 1910 (Dhahir du Bey en date du 5 juin 1905)
- Un cheptel de pur sang arabe reconnu pour sa pureté et respecté par les éleveurs étrangers inscrit à la Waho depuis 1978
- Une tradition de courses de chevaux arabes depuis 1905
- Une structure d’élevage organisée et contrôlée depuis 1860.
La filière cheval en Tunisie
- 5 000 éleveurs de chevaux autres que pur sang
- 500 éleveurs de chevaux de pur sang de courses
- 2 000 professionnels acteurs employés dans la filière
- 600 cavaliers et jeunes cavaliers adhérents des sports équestres
- 500 cavaliers d’équitation traditionnelle
- 300 cavaliers évoluant dans l’animation touristique
La filière Equine en Tunisie
La filière équine en Tunisie est un levier macroéconomique important par sa diversité car elle englobe plusieurs secteurs complémentaires tels que l’agriculture, la culture, le tourisme et le sport. Ce cheval arabe tunisien est aujourd’hui le témoin d’un siècle de traditions de courses de chevaux (1905) et le fruit de 125 années de sélection rigoureuse (1890). Quant au cheval barbe, race autochtone d’Afrique du Nord il porte fièrement les cinq milles ans de la civilisation capsienne, les exploits d’Hannibal et de ses cavaliers Numides, et l’essaimage de Tarik et ses cavaliers Zénètes.
Ce sont ces impacts hautement identitaires que nous cherchons à reproduire en nous intéressant à la mise en valeur de la filière équine dans notre pays et particulièrement à la préservation du cheval barbe et du cheval pur sang arabe de courses. Pour cela l’Usic a engagé depuis sa création en 2012 plusieurs actions de proximité et de soutien convaincue par le potentiel de la filière en matière de création d’emplois, de valorisation du patrimoine, de développement régional durable et de tourisme alternatif .Cette proximité lui a permis d’observer les dérives et les menaces qui pèsent sur ce patrimoine et sur le savoir-faire ancestral qui l’accompagne. Car, que ce soit à cause de l’absence d’intérêt des autorités compétentes ou à cause d’une mauvaise approche politique, la menace de perdre ces traditions, et par conséquent, leurs répercussions sur la dynamique de développement des régions, est évidente. Après une consultation nationale menée en 2013 et agrée par le Ministère de l’Agriculture un programme quinquennal pour 2016 / 2020 a été établi pour concrétiser les résultats de cette consultation. L’objectif de ce programme est d’encadrer les jeunes, sauver les emplois ,assurer leur transmission aux générations futures, de promouvoir notre patrimoine culturel en créant – autour de structures associatives régionales interconnectées animées par les bénéficiaires du programme – des produits inédits spécifiques à un tourisme d’intérieur favorisant les zones défavorisées pour lutter contre l’exode rural et l’immigration clandestine . Faut-il le rappeler : les régions où se pratique depuis des siècles l’élevage du cheval et l’équitation sont les zones les plus fortement touchées par l’inégalité du développement régional et les moins nanties en animation culturelle, touristique et sportive.
Présentation du secteur équin en Tunisie
De par sa diversité, sa richesse et sa large implantation géographique, le secteur équin constitue en Tunisie un élément culturel et un axe économique importants tant au niveau du secteur agricole qu’au niveau des traditions sociales, du tourisme et du sport.
Historiquement, la Tunisie est considérée comme un pays pionnier dans l’élevage et la sélection des chevaux arabes de course. La création du Haras National de Sidi Thabet remonte à 1860. Vétérinaire et enseignant zootechnie à l’INAT, le Pr. Michel Godard, considère « qu’aucune jumenterie de France ou d’Afrique n’est en mesure de soutenir la comparaison avec celle de Sidi Thabet en matière d’amélioration génétique de la race du cheval arabe, que ce soit pour l’homogénéité ou pour la pureté de la race (Congrès ECAT 5 Mai 1931). Ainsi, le cheval arabe tunisien est le témoin d’un siècle de tradition de courses de chevaux (1905) et le fruit de 125 années de sélection rigoureuse (1890).
Quant au cheval barbe, race autochtone d’Afrique du Nord, il porte fièrement la mémoire de la civilisation capésienne, des exploits d’Hannibal et de ses cavaliers numides jusqu’à Tarik et ses cavaliers zénètes autour du bassin méditerranéen. On le retrouve également dans l’essaimage de Godolphin Barbe à l’origine du cheval pur-sang anglais, prince incontesté des hippodromes.
Le cheval barbe
Le cheval barbe est le cheval autochtone d’Afrique du Nord. Il est présent dans toutes les mosaïques de l’ère carthaginoise, romaine, byzantine témoignant ainsi de son importance culturelle et sociale. Son phénotype est médioligne, présentant un profil convexe quelquefois busqué avec des formes « taillées à la hache ». Le standard de la race est défini par l’OMCB : Organisation Mondiale du Cheval Barbe: association créée le 21 Juin 1987 et dont le siège se trouve à Alger.
Voilà ce que dit le colonel Denis Bogros du standard dont il est le rédacteur. Ce standard est la description d’un cheval du Maghreb se rapprochant le plus de la race primitive sans trace d’infusion de sang arabe, il a été fait à titre indicatif, afin de réorienter les idées sympathiques mais flous de certains passionnés.
Le berceau du cheval barbe en Tunisie est compris entre le Tell Septentrional (Kroumirie) et le Haut Tell (Dorsale). La dorsale tunisienne, chaîne calcaire, s’étend des monts de Tébessa (Algérie) vers le Cap Bon et se compose de groupes montagneux calcaires, de plateaux escarpés et de dépressions : Chambi (1544 m), Semmama (1314 m), Serj (1357 m), Zaghouan (1295 m) et Sidi Abderahman (637 m). Ce sont ces régions qui portent le sceau de l’histoire du cheval barbe en Tunisie. Elles se nomment aujourd’hui Le Kef, Siliana, Kasserine, Gafsa, Oueslatiya. C’est dans ces régions que se pratique encore l’équitation traditionnelle dite « Michef » que nous définirons et développerons dans ce travail de mémorisation. Les us et coutumes de ce patrimoine sont au cœur des divers “Zarda”, “Kharja” et “Ziara” qui sont autant de regroupements tribaux à caractère pèlerin autour de nombreux marabouts et saints.
La morphologie du cheval barbe n’est pas uniforme. Elle est l’expression de son terroir d’élevage (sol, climat, conduite), de la pratique de son usage (parade, guerre, transport, labour) et du rang de ses maîtres (les juments des notables étaient saillies par les meilleurs étalons). Toutefois, il se reconnait grâce à une encolure moyennement longue, épaisse et bien greffée à sa base, un dos fort et porteur, une épaule distinguée et droite, une arrière main arrondie légèrement vers le bas et une attache de queue basse. Cet aspect permet au cheval barbe de supporter des fardeaux lourds particulièrement lors d’expéditions militaires. En effet, celui-ci est capable de porter un poids de 160 Kg et parcourir des distances importantes lors d’expéditions militaires durant des mois (jusqu’à 50 Km / jour). Ceux qui ont eu le plaisir de partager des épreuves avec ce cheval parlent d’un instinct, d’une complicité, d’une attention et d’un courage à toute épreuve mais aussi d’un être fier, fidèle et surtout tellement généreux au point qu’il parait quelques fois rancunier car il refuse l’injustice et les mauvais traitements.
Pour l’armée, il a été, durant un siècle, le cheval de guerre par excellence. Durant la guerre de Crimée, sous le commandement du Général Rachid et du Général Osman, le contingent tunisien de cavalerie, monté sur des chevaux barbes, participera au succès de la coalition française, anglaise et ottomane. Celui-ci, composé d’environ 12 000 soldats s’illustrera durant la bataille de Batakava. À son retour en Tunisie, il défila devant la grande mosquée de la Kasbah, en présence de S.A. M’Hamed Bey (1857). Les succès de la cavalerie tunisienne inspireront le réformateur Sadok Bey qui crée un centre d’élevage national du cheval autochtone : Le haras de Sidi Thabet (1866)
Les allures du cheval barbe sont légèrement disgracieuses. Elles rappellent dans certains mouvements les allures saccadées ( mais tellement équilibrées et confortables) d’un ambleur. Elles sont le fruit d’une sélection millénaire dont les racines remontent aux populations numides autochtones et, plus précisément, à leur mode de pratique de l’équitation. En effet, les Numides chevauchaient leurs chevaux sans harnachement, sans selle et sans bride. Un simple tapis servait de selle et un collier passé autour du cou de bride. Ainsi, le cavalier numide choisira le cheval confortable, donc celui dont les allures se rapprocheraient plus de l’amble. Avec les conquêtes musulmanes, on vit le cheval arabe faire son apparition en Afrique du Nord et c’est naturellement qu’il fut mélangé aux autochtones. Cet apport produira le cheval arabe barbe aux allures plus amples et au tempérament plus fougueux. Toutefois, vu le nombre limité de chevaux arabes arrivés au VII Siècle, puis au XI siècle, par rapport à la population autochtone, on serait amené à parler plus d’un “trempage” de sang que d’une “absorption” (selon la terminologie scientifique de la génétique) .
L’agilité du cheval barbe est reconnue à travers l’Histoire. De Massinissa à Micipsa, de Jughurta à Hannibal, de Tarik Ibn Zyad à Assad Ibn Al Fourat, les historiens louent l’agilité du cheval barbe et reconnaissent son apport différentiel par rapport à la cavalerie adverse. Selon Polybe, durant la bataille de La Trébia (deuxième guerre punique – 218 av JC -) Hannibal Barca remporte la victoire grâce à « la cavalerie numide légère », corps composé de 1800 cavaliers numides auxquels est assigné l’ordre de mener des actions d’attaque et de replis rapides pour attirer les légions romaines de Longus . Il en est de même durant la bataille de Cannes (216 av JC) où la légèreté de la cavalerie numide et la maniabilité du cheval barbe provoqueront l’effondrement de la cavalerie de Varron permettant ainsi l’encerclement des légions romaines et la victoire d’Hannibal. C’est aussi cette agilité qui sera l’atout principal de la victoire de Tarik face aux Wisigothes. L’armée wisigothe se composait essentiellement de cavaliers chevauchant des montures imposantes capables de supporter le total des poids du cavalier, de son armure et de ses protections. Ses mouvements étaient lents et ses chevaux lourds. Sur ordre de leur chef, les cavaliers zénètes (tribu amaziegh de la région de Kasserine) se sont déployés en aile de pigeon (figure que l’on retrouve aujourd’hui en équitation traditionnelle des Ouled Sidi Tlil) . Munis de glaive dans les deux mains et chevauchant à toute allure, ils attaquaient le corps de la cavalerie en réalisant des mouvements de bras vers le bas et blessant leurs adversaires au niveau des jambes ce qui provoquait la chute des cavaliers wisigoths. L’agilité des chevaux barbes et arabes-barbes associée à une équitation adaptée et une maîtrise des cavaliers zénétes (ce qui engendrera ensuite la monte à la « Jinete ») ont permis une victoire historique de la cavalerie berbère. Cet épisode de l’Histoire aura des impacts très profonds sur l’art équestre hispanique, d’une part, et surtout sur l’évolution des races autochtones en croisement avec ce cheval barbe et arabe-barbe (Andalous, Lisuthanien, Napolitain, Camarguais..).
Le Barbe à l’origine de la création d’autres races -Texte de Mr Ahmed Rayane-
Après la conquête de l’Andalousie par Tarik Ibn Ziad, en l’an 711, avec ses 8000 cavaliers et Moussa Ibn Noucair une année après, en 712, avec 15 000 cavaliers, qui va durer huit siècles, il serait aberrant de dire qu’il n’y a pas eu de croisement entre le cheval barbe et d’autres races ibériques, comme le prétendent certains. Le premier dérivé du barbe et de l’arabe-barbe fut le « genet d’Espagne ». Le C.N.R.T.L (Centre National des Ressources Textuelles et Lexicales) décrit le genet d’Espagne comme un petit cheval, bien proportionné et très résistant, issu d’un croisement d’andalous, de barbe et d’arabe. En réalité, c’est un croisement d’une jument andalouse et d’un arabe-barbe. Le genet d’Espagne est un ambleur comme le cheval barbe, comme il a été décrit précédemment. Le genet (“jinetta”, en langue espagnole) est un mot qui provient du mot Zénète, qui est le nom d’une confédération de tribus berbères réputée pour sa cavalerie. Le mot “jinetta” désigne, selon les espagnols, un style de monte, soit les jambes repliées, avec des étriers courts. On constate dans cette description le style de monte arabe.
Par ailleurs, un phénomène extraordinaire se produit : le cheval avait disparu des Amériques qui l’auraient vu naître. Hernando Cortez arriva au Mexique en 1522, il débarqua, en même temps que ses hommes, trente deux chevaux qui ont constitué la souche du peuplement équin en Amérique. Les conquistadors ont également débarqué des chevaux au Brésil et en Amérique du Nord. Les dérivés du barbe ont traversé l’Atlantique et ont réinstallé la race chevaline dans le continent américain d’où elle est originaire : à Saint Domingue en 1493, au Mexique en 1522, au Chili en 1541, en Argentine en 1580 et en Californie en 1768. De nouvelles races verront le jour, elles sont dérivées du cheval barbe : créoles, cimarrones, baguales, mustang. De nouveaux peuples deviendront cavaliers, amérindiens et immigrés, grâce au petit cheval d’Afrique du Nord. En plus du Lusitanien au Portugal, le barbe et l’arabe-barbe sont à l’origine du mustang, du quarter horse, du criollo en Argentine .
Au 14ème siècle les égyptiens ont classé les chevaux de selle en dix catégories dont deux concernent le Maghreb : le Barci ou cheval de Barca (Lybie) et le Maghrabi, ou cheval du Maghreb proprement dit qui est précisément le sujet traité. Au 16ème siècle, cette période de la renaissance, l’Europe occidentale manque cruellement de chevaux de selle légers et rapides. Pour combler ce déficit, les européens porteront leur choix sur les chevaux du Sud de la Méditerranée. Ce sont les marchands qui les importèrent de Tunis, de Constantine et d’Alger. À ce cheval exotique, il convenait de donner un nom. Les français le nomment « barbe » probablement par rapport à l’origine berbère des peuples qui les élèvent. Du côté du Maroc et de l’Andalousie, les espagnols exportèrent les dérivés du barbe, le genet d’Espagne. Par la suite, ce cheval a gagné toute l’Europe occidentale. Il a permis de produire par croisement, les meilleures races de chevaux de selle.
Les successeurs de Louis le Juste achèteront de nombreux chevaux barbes pour les utiliser comme étalons royaux. Ils les répartiront dans le royaume de France pour tenter d’améliorer les populations chevalines indigènes. Les allemands, après la bataille de Poitiers, captureront des chevaux abandonnés par des cavaliers zénètes. Ils crurent avoir des chevaux arabes alors que c’étaient des arabes-barbes. C’est à cette époque que fut créée la race Oldenbourg, en Allemagne.
En recevant dans la dote de sa femme, la ville de Tanger en 1662, Charles II d’Angleterre profite pour importer du Maroc des chevaux, dont les juments « Royale Barbe » et « Barbe Mare ». Le frère de Charles II, Jaques II d’Angleterre poursuivit l’élevage et acheta deux étalons, Curwen-Barbe et Toulouse-Barbe, offerts au Roi Louis XIV par le Sultan Moulay Ismail. Leurs descendants seront présentés à Godolphin Barbe né en Tunisie en 1724, sous le nom de Sham. Cette époque connut la création du pur sang anglais qui restera dans l’histoire, le cheval de course par excellence ! Ce cheval est né d’une saillie accidentelle pour certains et désirée pour d’autres. Est-ce le fait du destin ? L’histoire de sa création ne peut être le fait d’un simple hasard ! Cette belle histoire qui s’est passé en 1730 entre un cheval barbe et une jument anglaise, est comparable à celle qui est arrivée entre des êtres humains tels que Romeo et Juliette en Europe, Kais et Leila en Orient, Said et Hizia au Maghreb. Ce serait l’histoire d’une rencontre en Angleterre entre un Berbère et une Anglaise (le cheval Godolphin Barbe et la jument Roxana). Leur histoire figure dans quelques pages d’un recueil paru aux éditions Plon, sous le titre de « Le bonheur des uns » de Maurice Druon. Ce grand écrivain, qui fut secrétaire perpétuel de l’Académie française et ancien Ministre de la culture, a été un grand ami du cheval et un ancien cavalier du cadre noir de Saumur, en France. Cet auteur a consacré quelques pages superbes à l’un des chevaux les plus célèbres de l’histoire. Il s’agit de Godolphin barbe, l’ancêtre du pur sang anglais. Sur tous les hippodromes du monde défilent, au milieu des foules attirées, des chevaux qui sont objet d’orgueil ou de passion, sur lesquels se jouent des milliards, et dont la presse, en première page, commente les victoires ; il n’est pas un seul d’entre eux qui ne porte dans ses veines une goutte au moins du sang de Godolphin barbe, du cheval du Roi, du traîneur de tonneaux, de l’amant humilié puis triomphant, qui portait une étoile blanche au front, et que sa destinée fit naître sur les rives de Carthage pour le mener mourir dans les collines de Cambridge. Godolphin barbe eut ses biographes, ses peintres et sa légende. Georges Stubbs, le grand dessinateur de chevaux, fit son portrait; Rosa Bonheur, dans son tableau intitulé le duel, peignit son combat contre Hobgoblin ; Eugène Sue, socialiste, turfiste et l’un des fondateurs, avec Mylord L’Ardouille, du Jockey Club, en fit le héros d’un roman ; enfin, honneur suprême, une page de l’encyclopédie britannique est consacrée au petit prince du désert et à la race issue de lui. Aussi, nous avons le plaisir de partager avec vous cette très belle histoire, écrite en 1957, dont voici le texte intégral.
Le Barbe à l’origine de la création du plus célèbre coursier « Eclipse » par Ahmed Rayen
Deux siècles se sont écoulés. Il n’y a plus de chevaux à Gog-Magog Estate, confié à la Cambridge Préservation Society. Un ancien lad, vieil homme aux cheveux blancs qui grade le domaine, balaie de temps à autre la tombe de Godolphin et se souvient encore de l’époque où le haras retentissait de hennissements. L’arche de la voûte est toujours là, par laquelle s’enfuirent les amants fous. J’ai marché dans la forêt de leurs amours. Un chat rayé, un chat roux aux yeux d’or, habitent l’écurie, hantent le box où vécut Godolphin et passent d’un pas prudent sur la pierre gravée.
Lui, de taille petite mais admirablement prise, la jambe mince, le pied étroit, la poitrine profonde, le regard brun velours, entouré d’immenses cils noirs, la narine courte et bien ouverte, de la noblesse en son allure, de la fierté, du panache… bref, un cheval comme on en voit très peu d’hommes. Elle?… Elle, je vous en parlerai tout à l’heure.
L’histoire que je vais vous conter commence à Paris, au printemps de 1730, l’après-midi de la Fête-Dieu, dans le quartier des Gobelins. Ce jour là, traditionnellement, la célèbre manufacture exposait ses pièces de collection et ses productions de l’année. De haut en bas des murs, la grande cour était tendue des plus somptueuses tapisseries du monde. C’était une curiosité chaudement recommandée par le guide des voyageurs étrangers à Paris dont l’auteur précisait toutefois : « Mais je conseille aux étrangers de prendre bien soin de leurs proches, car on ne sait souvent pas qui on a près de soi, à cause de cette infinité de monde qui entre et sort. »
Cocke, touriste anglais, portant lourde perruque et petit chapeau rond, s’en revenait de visiter l’exposition. M. Cocke n’était pas particulièrement amateur de tapisserie ; il était plutôt spécialiste en chevaux de course. Les bras ballant et le ventre pointant sous un gilet court, M. Cocke se laissait porter dans le flot des promeneurs qui, par la rue Croulebarbe bordée de cultures maraîchères, gagnaient le faubourg Saint-Marcel. L’Anglais regardait avec complaisance les jolies bourgeoises en robes rayées, telles que M. Watteau, mort quelques années plutôt, les avait peintes. Ni la cohue, ni le vacarme ne le surprenaient ; son guide des voyageurs l’avait averti : “Il faut être attentif quand on se trouve dans les rues de Paris. Outre la foule de ceux qui vont à pied et souvent se heurtent, il y a un nombre considérable de carrosses et de fiacres qui roulent ça et la jusqu’a la nuit noire. Ces voitures vont vite, il faut avoir un œil de tous cotes On veut éviter une personne qui est devant soi et on est déjà pressé par celle qui suit, car le bruit des voitures empêche de l’entendre.” M. Cocke, en vérité, n’était pas suffisamment attentif, car soudain il se sentit heurté violemment à l’épaule et s’en fut rouler dans la poussière, il se releva sans trop de dommage, au milieu de l’attroupement qui s’était aussitôt formé et vit l’équipage qui venait de le renverser, un lourd tonneau de marchand d’eau. Le propriétaire, auvergnat comme presque tous les hommes de sa profession, avait sauté à bas de son siège et aidait l’anglais à s’épousseter. « Faites excuse, mon bourgeois, disait le marchand d’eau, c’est la faute de cette rosse que je ne peux point tenir, qui tire sur le mors et n’en fait qu’à sa tête. Un jour il tuera un passant, ce cheval-là, et m’enverra en prison ». Il désignait le cheval qui tirait le tonneau, un animal crotté, d’aspect misérable, si maigre qu’on lui voyait saillir les os, et dont la peau en maintes places était blessée par le harnais, un mors trop lourd, trop large pour sa bouche, le faisait souffrir visiblement. « C’est une mauvaise affaire que j’ai faite là, pour sûr, une vraie charogne », continuait l’auvergnat, en levant le manche de son fouet pour soulager sa colère. Mais M. Cocke lui arrêta le bras, il regardait le cheval et le cheval le regardait. Pour celui qui connait les chevaux et les aime, le regard d’un cheval peut être aussi expressif, aussi révélateur qu’un regard humain. Et les chevaux aussi reconnaissent parmi les hommes ceux qui savent les comprendre. Un cheval choisit son maître, autant que le maître choisit la monture. Ce grand œil sombre, à la fois fier et effrayé qui se tournait vers l’anglais, n’appartenait pas à une bête de trait, à un animal né pour une condition serve. ” Laissez-moi voir ce cheval ” , dit M. Cocke. ” D’ou vient-il, comment l’avez-vous acheté ? “
Le marchand d’eau, ayant reconnu l’accent du touriste, se mit aussitôt à lui donner du « Milord » : ” vous pouvez bien le regarder tout votre soul, une mauvaise affaire, je l’ai acheté parce qu’il venait des écuries du Roi, à ce qu’on m’a dit je me demande comment il pouvait bien servir au Roi, puisqu’il n’est même pas bon à tirer un tonneau”. “Les écuries du Roi ?” dit l’anglais qui avait autant de mal a comprendre l’accent de l’auvergnat que l’auvergnat en avait à entendre le sien, ” l’étrange chose ! Je ne savais pas que le Roi de France ait eu des chevaux arabes. Comment se nomme celui-ci ?” “ Sham. Ce n’est pas un nom de cheval de chrétien.” M. Cocke, le corps ployé palpait les jambes du cheval, incrustées de poussière. Puis, se redressant, il examina l’angle formé par l’ossature de l’épaule, la courbe de l’encolure, l’attache de la tête. “Vous voulez me le vendre ?” demanda-il enfin. ” Vous le vendre ? Ah ! tout de suite, mon Milord ” s’écria l’auvergnat. Mais, il se reprit rapidement. Le cheval était une mauvaise acquisition, certes; mais il l’avait quand même payé fort cher ; et puis l’avoine ne se donnait pas. Maintenant, il allait lui falloir trouver un autre, et les prix montaient. L’auvergnat avança finalement un prix qui lui semblait énorme, soixante-quinze francs. M. Cocke accepta sans discuter. ” Sont-ils bêtes ces anglais“, disait le marchand d’eau en conduisant Sham le soir même aux écuries de l’hôtel d’Entragues, rue de Tournon. Les palefreniers de ce luxueux hôtel pour étrangers fortunés firent la moue lorsqu’ils eurent a étriller le maigre bidet noir qui semblait avoir dormi depuis des mois sur du fumier. Dès le lendemain, M. Cocke se mit en quête des origines de Sham. Le cheval était déjà passé par plusieurs mains. Remontant de propriétaire en propriétaire, tous petites gens qui s’étaient servis de Sham pour l’atteler et en avaient connu des déboires, M. Cocke parvint jusqu’á un palefrenier de Versailles. L’auvergnat avait dit vrai, Sham provenait effectivement des écuries royales, il avait fait partie d’un lot de huit étalons barbes envoyés à Louis XV, en cadeau, par le Bey de Tunis à l’occasion d’un traité de commerce. Ces petits chevaux nerveux, difficiles à monter pour qui ne les connaissait pas, et dont la finesse, loin de flatter les goûts de l’époque, semblait plutôt dérisoire, firent hausser les épaules au Roi qui ne trouva jamais monture à son goût puisqu’il en essaya dans sa vie plus de deux mille, par caprice sans vraiment en élire aucune. Comme le Roi avait haussé les épaules, le grand écuyer en fit autant, et tous les subalternes après lui. Les étalons barbes furent relégués dans un coin des écuries jusqu’à ce qu’ils fussent donnés, en gratification à des membres du personnel, qui eux-mêmes s’en défirent. Ainsi Sham, prince du désert, descendant d’un ancêtre nommé « Ailes du vent », et présent d’un souverain d’islam au Roi Louis le Bien Aimé, était-il arrivé jusqu’à la rue Croulebarbe, entre les brancards d’un marchand d’eau. Il avait alors six ans. Partir d’un si haut Etat pour parvenir après tant de vicissitudes à un tel degré d’abaissement, il n’était encore qu’au début de sa destinée. Il avait franchi la Méditerranée sur une galère barbaresque, il passa la manche sur un bon bateau rond. Il avait connu le sable d Afrique et le pave de Paris, il posa le sabot sur la douce herbe d’Angleterre. À Londres, M. Cocke fréquentait la taverne Saint-James, un cabaret à la mode où se réunissaient particulièrement des joueurs, des amateurs de chevaux et dont le propriétaire Roger Williams, fait lui même courir des chevaux. M. Cocke était plutôt embarrassé de son acquisition. Il avait cédé à une impulsion soudaine, à son mouvement de curiosité et un désir d’étonner. Il avait une amusante histoire raconter, mais il ne savait plus que faire du cheval qui l’avait renversé. Il revendit Sham pour vingt guinées au tenancier de la taverne, lequel mit le jeune étalon au vert pendant quelque temps. Le prince du désert reprit alors son aspect véritable ; il retrouva ses formes rondes, sa longue crinière frémissante, sa queue fournie, qui tombait jusqu’à terre avec des mouvements d’éventail, sa belle croupe large, ses muscles ciselés et son pelage soyeux d’un noir si intense que, sous la lumière, il virait au bleu.
Les courses hippiques avaient déjà grande vogue en Angleterre, et cela depuis une trentaine d’années, mais les chevaux qu’on y présentait ne ressemblaient en rien à ceux d’aujourd’hui. Le modèle des montures d’alors était encore proche du cheval de cavalerie médiévale, haut, lourd, fort porteur pour pouvoir soutenir le poids de l’armure, et qui défonçait le sol sous son galop avec un bruit d’avalanche. M. Williams, le tavernier aimait la plaisanterie. « Je vais faire courir le nègre » dit-il, car c’est ainsi qu’il appelait Sham. Mais Sham, lui aussi avait le sens de l’humour, lorsqu’on l’amena sur le terrain, il refusa de prendre le départ, et comme on le pressait un peu trop entre les éperons, il rua, pointa, jeta le jockey à terre, et secouant sa crinière, retourna aux écuries. À deux ou trois reprises, on renouvela la tentative, vainement. Ce cheval n’avait pas le goût de la compétition. À l’entrainement, et seul, il promettait merveille et glissait comme une flèche noire sur les pistes d’herbe, mais dès qu’on le mettait en rivalité avec de gros concurrents, il semblait en prendre outrage et devenait un danger pour qui l’approchait. ” Mauvaise affaire ” dit M. Williams comme l’avaient dit avant lui le Roi Louis XV, le marchand d’eau, et M. Cocke. Aussi, Williams fut enchanté de céder Sham à l’un de ses clients, Lord Godolphin, en se contentant d’un mince bénéfice. Le marché fut conclu pour vingt cinq guinées. Pour Lord Godolphin, ex-trésorier de la maison Royale, ex-député d’Oxford, membre de la chambre des Lords et gendre du premier Duc de Marlborough dont il avait épousé la fille, Lady Henrietta Churchill, vingt-cinq guinées n’étaient rien, et pas même cent et pas même mille, s’il s’agissait de chevaux. Ce fort honnête homme avait deux passions, les échecs et les courses. La seconde devait d’ailleurs finir par le ruiner. Il entretenait, dans le Cambridgeshire, une écurie nombreuse ; Sham n’était pour lui qu’une fantaisie exotique. ” J’enverrai le nègre à Gog-Magog “, décida Lord Godolphin qui avait donné à ses haras, bizarrement, le nom des géants légendaires de la bible.
La nature féminine a le goût de l’étrange et de l’inhabituel, l’attrait du dépaysement. L’arrivée du bel oriental provoqua quelque émoi parmi les juments de Gog-Magog. Voyant ses pouliches élargir les naseaux et redresser le col au passage de Sham, Lord Godolphin ordonna que le cheval pour gagner son avoine, tint le rôle « d’agaceur ». Ainsi fut employé, pendant plusieurs mois, celui que déjà on ne désignait plus autrement que sous le nom de « Godolphin Arabian » , l’Arabe de Lord Godolphin. Lorsque des épousailles étaient décidées à Gog-Magog, le prince du désert était amené auprès de la future mère pour flirter avec elle et la mettre en humeur amoureuse. Puis, quand la belle, sensible à la séduction du petit cheval noir, semblait suffisamment préparée aux hommages, on faisait entrer dans la stalle le maître étalon, le Roi du Haras, l’énorme Hobgoblin, qui s’avançait, lourd portant, satisfait, se dandinant un peu dans sa grasse apparence, pour accomplir avec le moindre effort l’œuvre de paternité. Et Godolphin Arabian était prié de s’effacer devant ce seigneur imposant dont il avait préparé le plaisir. Cette retraite humiliante était mal tolérée par un cheval si vif, dont le sang était habitué à la conquête et qui avait un sentiment si développé de son honneur, mais une longe fermement tenue par des lads de Lord Godolphin, ramenait le nègre dans les limites du respect. Les choses se passèrent de la sorte, jusqu’au jour, mémorable entre tous dans l’histoire des chevaux de courses, où apparut devant Godolphin Arabian une superbe blonde, une alezane dorée, très jeune encore, mais dėjà opulente en ses formes et fort nerveuse, inquiète d’être conduite à ses premières noces. Elle s’appelait Roxana. Qu’elle vint des haras royaux, où Lord Godolphin l’avait payée soixante guinées, ne l’empêcha pas d’éprouver le coup de foudre pour l’agaceur oriental . Plus intuitive, sans doute que les hommes, elle avait reconnu en Godolphin Arabian un sang également royal. Et le prince du désert, lui aussi, montra dès l’abord, pour la blonde Roxana, un élan, une passion, plus fougueux qu’il n’en avait jamais témoigné. Entre ces deux commença une danse d’amour éperdue, somptueuse, un ballet de la séduction comme seuls les animaux, les abeilles filant droit dans le soleil pour célébrer leur union, les libellules mirant dans les eaux leurs ébats nacrés, les oiseaux déployant leurs couleurs, savent en accomplir. Au moment ou Roxana, éperdue, allait s’abandonner, on approche, ainsi qu’à l’accoutumée, le gigantesque, le gras, le puissant Hobgoblin. Mais on vit alors le petit cheval noir, ivre de rage, se dresser et se précipiter, sabots levés, vers son rival. En vain les lads tiraient sur les longes, Godolphin cassa le cuir de ses liens, et la bataille s’engagea, sous les yeux terrifiés des hommes d’écuries qui n’osaient avancer de peur d’être assommés. La paille volait dans la stalle, les bat-flanc résonnaient frappés par les fers, le combat se déroulait dans une poussière épaisse. Le lourd Hobgoblin, habitué à d’autres traitements, n’était pas préparé à une telle attaque, il était trop lourd pour riposter aux assauts furieux, précipités, tourbillonnants de son mince adversaire, à coups de sabots et à coups de dents, Godolphin, en quelques instants, tua l’énorme Hobgoblin. Le David des chevaux avait abattu le Goliath, et comme David, il exigea pour récompense la princesse royale. Brisant les portes, sans que personne ne puisse s’opposer à sa violence, il s’élança vers la liberté, entrainant la belle Roxana, éblouie de cette victoire, amoureuse et à jamais conquise. Leur galop crépita sur le sol de l’écurie et ils s’enfuirent ensemble dans la forêt voisine. On les retrouvera le soir, heureux. Un peu las et à nouveaux dociles, appuyés l’un sur l’autre. La tête de la blonde Roxana posée sur l’encolure noire de son conquérant.
Le personnel du haras n’était pas fier ; on ne savait comment annoncer à Lord Godolphin que son meilleur étalon avait été tué et que sa plus prometteuse pouliche, la plus coûteuse aussi, était partie vivre sa lune de miel dans les bois avec le nègre . Mais Lord Godolphin, en plus du sens de la fantaisie, avait celui de l’honneur. Le petit récit de cette bataille lui plut, et il prit de l’estime pour son cheval arabe en dépit du dommage causé, « Nous verrons bien quel sera le produit » dit-il. Or, le produit de cette union romanesque fut un cheval nommé LATH qui naquit en 1732 et, dès qu’il parut sur les champs de courses, remporta tous les prix. On n’avait jamais vu pied plus sûr, ni train plus rapide. Ses lourds concurrents peinaient à vingt longueurs derrière lui. Cet enfant de l’amour était invincible. Du même coup, la race dite curieusement « de pur sang anglais » était née.
Godolphin Arabian fut relevé du rôle d’agaceur ; on craignait trop qu’il ne fut ressaisi de ses fureurs meurtrières . Mais Roxana, de son côté, refusait toute alliance, elle ne voulait appartenir qu’à Godolphin. Les deux chevaux semblaient souffrir, lorsqu’ils se trouvaient séparés ils devenaient nerveux, refusaient la nourriture. Il a fallu les mettre dans des salles voisines et comme Roxana restait rétive à toute autre approche, on dut consentir à leur seconde union. Roxana était décidément l’épouse d’un seul cheval.
Ils n’eurent pas beaucoup d’enfants, car la magnifique blonde mourut, hélas dix jours après ses deuxièmes couches, en 1734. Mais eurent beaucoup de petits enfants. Leur second fils, Cade l’orphelin de mère qui fut élevé au lait de vache, devait être le père de l’illustre Matchem qui gagna onze courses sur treize, leurs descendants croisés aux produits de deux étalons arabes, The Byerly Turck et The Darley Arabian, ainsi appelés du nom de leurs propriétaires respectifs, le Captain Byerly et Mgr. Darley D’alby Park, sont les ancêtres de tous les chevaux qui depuis courent sur le globe. Après la mort de Roxana, Godolphin devait vivre près de vingt ans encore, il fut veuf, non point inconsolable, mais triste. Plusieurs épouses lui furent offertes, dont chaque fois, naquit un cheval prestigieux, par lui-même ou par sa lignée, tel Regulus, telle Silleta, sa petite fille, mère de Flying-Childers, dix huit fois invaincu, et du célèbre Eclipse, les deux chevaux prodigieux du 18ème siècle. Godolphin Arabian, l’étalon de Gog-Magog, était devenu illustre en Angleterre. Son maître lui avait donné un palefrenier maure qui ne devait s’occuper que de lui. L’étalon, néanmoins, restait d’humeur solitaire. Aucune compagnie, aucune présence ne semblait lui plaire, sinon celle d’un petit chat rayé, nommé Grumalkin, qui vivait dans son box, dormait entre ses jambes ou, pendant la journée, ronronnait sur son dos.
Les jours de courses, Godolphin vieillissant, splendidement harnaché à l’orientale et monté par son palefrenier maure enturbanné, était amené sur l’hippodrome, lui qui n’avait jamais voulu courir, pour assister au triomphe de ses descendants. Le cheval de soixante quinze francs avait déjà rapporté, par sa progéniture, des dizaines de milliers de livres, les parieurs le saluaient ; les enfants l’entouraient en l’acclamant. Lui, secouant encore sa petite tête nerveuse, sa longue crinière et sa queue touffue, grattait le sol, feignant l’impatience, et s’offrait à l’admiration, comme un vieux Roi. Lorsqu’il mourut, à vingt neuf ans passés, âge exceptionnel pour un cheval, il fut enterré dans les écuries de Gog-Magog, sous une voûte séparant deux séries de stalles, et à l’endroit même d’où il avait fui vers les bois avec la blonde Roxana. Son nom fut gravé sur sa tombe, et des chaines mises autour de la pierre. Le palefrenier maure et le chat Grimalkin moururent tous deux dans le mois qui suivit.
L’arbre généalogique d’Eclipse serait le suivant : Alezan né en 1764 par Markes et Spiletta, le plus célèbre cheval du monde ne fut jamais battu et a du être retiré des courses car plus aucun cheval n’acceptait de prendre le départ contre lui. Dans son pédigrée, figurent Godolphin Barbe, du côté paternel ainsi que 17 étalons orientaux et deux juments barbes . L’historien Fernand Braudel s’est posé la question de savoir comment les anglais avaient eu la chance d’importer des barbes d’Afrique du Nord, la réponse nous parait simple. Les anglais sont de bons éleveurs qui aiment les chevaux. On peut ajouter à cela que Charles II a disposé du port de Tanger durant vingt ans. Sa femme le lui avait apporté en dot. Les anglais se sont donné les moyens de leur projet, ils ont été récompensés par trois grands chefs de race : des descendants directs de barbes, les pédigrées le prouvent : –Matchem est barbe à plus de 30% ;
–Hérod est barbe à plus de 18% ;
–Eclipse est barbe à plus de 25%.
Ce sont les premiers pur-sang anglais. Sur les trois chefs de race, Matchem et Eclipse sont descendants directs de Godolphin Barbe.
Le cheval arabe
Sous sa forme actuelle, le cheval pur-sang arabe en Tunisie, est un cheptel organisé administrativement par la Fondation Nationale pour l’Amélioration de la Race Chevaline (FNARC). La FNARC est un EPNA (Etablissement Public Non Administratif) créé en 1988 pour succéder aux haras nationaux, organisme dirigé à son époque par le Secrétariat d’État à l’Agriculture et hérité de l’organisation administrative coloniale. Le cheptel national de pur-sang arabe est géré par un logiciel, le SIRET, qui adopte le système de contrôle de filiation des naissances par l’analyse de l’ADN. Le cheval arabe fut introduit en Tunisie par le protectorat français, dès 1881, dans le but de produire des chevaux de remonte pour la cavalerie de l’armée française. Durant cette période, les Etablissements Hippiques Coloniaux d’Afrique du Nord (E.H.C.A.N) ont créé et / ou géré les établissements d’élevage de chevaux à Tiaret (Algérie), Sidi Thabet (Tunisie) et Meknès (Maroc). La gestion des achats, des effectifs, la permutation des étalons et des poulinières était effectuée par le Haras de Pompadour. C’est ainsi qu’il fut introduit, , au Haras de Sidi Thabet, à partir de 1881, des reproducteurs importés du Haras de Pompadour. Il s’agit de :
–Farha : née en 1869 en Syrie, importée en France en 1872, stationnée au Haras de Pompadour, importée en Tunisie en 1881, entrée en production au Haras en Tunisie en 1882.
– Fadaise : née en 1878 au Haras de Pompadour par Harami et Dolma Batché, importée en Tunisie en 1881, entrée en production au Haras en Tunisie en 1882.
– Flanelle : née en 1878 au Haras de Pompadour par Sadrazam et Yamouna, importée en Tunisie en 1881, entrée en production au Haras en Tunisie en 1882.
– Mechta : mâle né en 1884 par Argoub et Koheyla, importé en Tunisie en 1889
– Samaria : née en 1880 en Syrie, de souche Kouhaylan Ajouz, importée en France en 1884, importée en Tunisie en 1890, entrée en production au Haras de Sidi Thabet en 1892
– Sherazade : née en 1888 au Haras de Pompadour par Ramses II et Samaria, importée en Tunisie avec sa mère en 1890, entrée en production au Haras de Sidi Thabet en 1892.
– Khamil : Mâle né en Orient en 1894, importé en Tunisie en 1898.
– Aden : Mâle né en 1903 au Haras de Pompadour par Mourgadek et Adoua, importé en Tunisie en 1906.
Les lignées influentes de pur-sang arabe en Tunisie
La lignée d’El Managhi : El Managhi est né en 1923 en Syrie importé en Algérie en 1928 a l’âge de cinq ans (5) par la mission du capitaine Bardo en compagnie de Bango et El Obeyan puis en Tunisie par le jeu de rotation des reproducteurs. Au haras, il produira:
– Souci né en 1935 en Algérie par El Managhi et Deqiqa, importé en Tunisie en 1938. Il a produit Madani né en 1949 par Sissana au haras de Meknassy propriété du Dr Lovy. Madani produira en 1957 In Challah (par Gafsa) futur chef de race en France grâce à son petit fils Cheri Bibi
-Oukrif : né en 1933 par El Managhi et Bettiya. Il a produit Tabriz né en 1949 au Haras de Sidi Bou Ali par Hama. Sa lignée mâle s’est éteinte mais son influence reste grâce à Sibawaih
Ces deux petits fils d’El Managhi ont été les champions de leurs générations. En 1951, Tabriz a défait Madani dans le prix d’Essai des poulains et ce dernier a pris sa revanche quinze jours après lors du Critérium. En Mai 1952, Tabriz gagne le prix Lovy , le prix d’Essai des poulains le grand prix de l’Agriculture devant Madani . En Décembre, Madani remporte le Grand Prix d’Automne et prend sa revanche sur Tabriz accidenté qui a pris la troisième place et est rentré au haras.
La lignée de Hellal : Hellal est né en Syrie en 1908 et importé en Algérie ( à Tiaret) en 1913 . Entrée au haras en 1914, il produira en 1919 Bouq ( par Kabla) son meilleur fils . Celui-ci produira à son tour en 1942 Loubieh qui engendrera en 1953 Chetoui (par Ouzira)
-Chetoui : né au haras de Bordj French (Lucien Cathan) en 1953 par Loubieh et Ouzira . Champion incontesté de sa génération, il produira en 1962 le phénomène Misk (par Soukria) invaincu sur les hippodromes et étalon exceptionnel.
La lignée de Nasr : Nasr est né en Egypte 1918 par Ghatouan (lignée du Nejd) et Saklaouia (Tribu des Feidhan). Vainqueur de 13 courses entre 1921 et 1924 dont le grand d’Héliopolis, il fut classé vice champion de sa génération en 1923 et champion toutes générations en 1924. Importé en Tunisie en 1925, il produira en 1938 l’étalon Fadjer lequel, exporté en Algérie par la rotation des effectifs orchestré par l’ E.H.C.A.N, produira en 1944 le cheval Hazil
-Hazil : Né à Tiaret en 1944 par Fadjer et Lahbiba, importé par Mr Anatole Cordonnier en 1953 au haras de Sidi Bou Hadid. Il produira en 1955 Esmet Ali chef de race en Tunisie.
La lignée de Dynamite II : Dynamite II est né au Hidjaz en 1918. Il est le fils de Tayyara, la jument chérie de l’Emir Hidassi. Il fut dérobé lors d’une razzia alors qu’il était âgé d’un an. On retrouva sa trace en 1925 sur les hippodromes au Liban, sous les couleurs de son propriétaire, riche banquier du nom d’Ellie Burlock. De peur de représailles le cheval fut vendu et exporté en Tunisie sur un bateau de guerre français. Entré au Haras de Sidi Thabet en 1926, il produira en 1941 son meilleur fils Ibn
-Ibn : Né à Sidi Thabet en 1941 par Dynamite II et Ghafir . Cheval de courses de niveau classique, sa lignée s’est développée grâce à Koufi, Koraich, Soufyan. Mais son meilleur produit sera Sibawaih qui consolidera la lignée d’Ibn et sera un chef de race remarquable.
La lignée de Ibn Fayda : Ibn Fayda est né en 1925 en Egypte au haras de Saft Khaled par Ibn Rabdan (de la lignée prestigieuse de Saklaoui Jedrane) et Fayda ( haras de Cheikh Obeyed) . Don de Son Altesse le prince Kamel Eddine Hussein au Haras de Sidi Thabet. Entré au haras en 1929, il marquera le cheptel par la qualité de ses filles qualifiées d’excellentes reproductrices.
La lignée de Cheikh El Ourbane : Cheikh El Ourbane est né en Syrie en 1940 et importé en Tunisie en 1945. Au haras, il produira Raoui (par Bornia) en 1965. Malheureusement cette lignée d’étalon n’a pas de successeur. Par contre, cette lignée est très puissante en reproductrices.
Les structures d’élevage en Tunisie
Les premières structures organisées pour l’élevage du cheval en Tunisie remontent à 1830 , au moment de la création de l’École Polytechnique du Bardo par S.A. le premier Muschir Ahmed Bey. C’est la caserne d’El Battan qui accompagnera les premiers essais d’élevage organisé et administré. Ces initiatives avaient pour but de doter la jeune armée tunisienne d’une cavalerie professionnelle capable de mener à bien les missions politiques relatives aux conclusions des arrangements du 17 Décembre 1830 et du 06 Février 1831 conclus entre Hussein Bey et le Général Clauzel (accords relatif à l’achat du Constantinople et son rattachement à la régence de Tunisie sous commandement de Sidi Mustapha Bey). Toutefois, c’est Sadok Bey qui créera en 1866 le premier haras organisé selon le modèle des haras nationaux français : le Haras de Sidi Thabet.
Il parait plus judicieux, à ce propos, de publier les articles recueillis de l’époque comme témoignage.
Article du Dr. Godard lors du congrès d’agronomie du cinquantenaire de l’Ecole Coloniale d’Agriculture de Tunisie – Tome II Tunis le 27 Avril – 08 Mai 1931
Les établissements d’élevage de Sidi Thabet et d’Ebba-Ksour
Après le succès de la cavalerie Tunisienne durant la guerre de Crimée Sidi Sadok Bey fonde en 1866 les établissements de Sidi Thabet pour l’élevage du cheval barbe .
Les sociétés des courses hippiques de Tunisie
Les premiers essais de création de société des courses remontent à plus d’un siècle. La première, la société hippique et des courses de Tunis, naquit en 1884 sous le règne du Bey Ali III. Elle était composée de propriétaires français, italiens et maltais et administrée par le Ministre de la Plume de l’époque, M’Hamed Jellouli. La seconde, la société hippique et des courses du Sahel fut créée en 1903, en même temps que celle du Nord Ouest.
Le premier hippodrome en Tunisie a été édifié sur le domaine agricole de Mégrine. Le domaine était une société agricole ayant comme principaux actionnaires le Comte Fernand Foy, Etienne Malet Baron de Chalmassy, le Comte Olivier Le Boulet, le Baron Stanislas Benoit-Melin et Monsieur Maurice Bontoux. L’inauguration de l’hippodrome de Mégrine intégrée sur recommandation du Comte Foy, homme de cheval dont le nom est associé à une des courses préparatoires du prix de l’Arc de Triomphe, eu lieu le 18 Mai 1884 en présence du Bey héritier du trône Mohamed Hadi Bey. Ce dernier était un amateur de chevaux et pratiquait l’art de l’équitation avec son ami Mohamed Zarrouk.
L’arrêté du 21 avril 1892 organisa la société hippique et en 1893 l’hippodrome de Kassar Said vit le jour. Il a été édifié sur les terres du domaine du Palais de Kassar Said dont il porte le nom grâce à l’intervention personnelle de Son Altesse Mohamed Hadi Bey. En effet, le palais était devenu propriété de sa sœur Lella Hallouma Bey, épouse Sidi Hayder Efendi et ses filles Lella Zeineb épouse Rachid Hayder et Lella Aicha Bey, épouse Sadok Bey .
Sur instruction de Son Altesse Mohamed Hadi, devenu Bey régnant, la société des courses fut accréditée du statut d’association d’intérêt public. Celle-ci fut notifiée ultérieurement le 04 Mars 1908 (soit deux ans après sa mort) sous le règne de Sidi Naceur Bey
Sur ordonnance de Sidi Naceur Bey datée du 05 mai 1919, Hammouda Boussen intègre le conseil d’administration de la société des courses. Celui-ci ouvrira très vite la porte aux propriétaires tunisiens . Le premier cheikh Ahmed Kaddour intègre le conseil en 1920, puis Sadok Mrabet et Ferid Baccouche (1928). Ceux-ci participent à la promotion des courses et parrainent la naissance de nouvelles casaques tunisiennes Abderrahmane Essaied , Moncef Baccouche, Bechir Ben M’rad, Said Bouziri (1935). Ces grands noms servirent avec ferveur l’hippisme tunisien et lui consacrèrent une grande partie de leur vie. La pérennité de cette œuvre à laquelle nous rendons le plus grand hommage fut assuré par leurs descendants et proches. Abdelhafidh Kaddour, Moncef Baccouche et Mohamed Essaied marqueront particulièrement les années cinquante par leur engagement en faveur des cours en tant que hauts responsables du comité de la Société d’Encouragement. Durant plusieurs décennies, Kassar Said sera un haut lieu de sport et d’élégance. De la Comtesse de Montesson à la Marquise Jacqueline de Challus ( plus connue Mme Hess) , du Dr Leucher au Dr Hamda Laouani, des familles Achille Attias, Abelyasis, Almanza, Bokobza, Ben Mussa, Bellaiche, Besnainou, Caruanna, Cohen, Coyetaux, Cordonnier, Cathan, Deguerra, Fabre, Fannara, Guedj, Lellouche, Léucher, Liccari, Maarek, Magnan, Micalef, Pico, Peignon, Poulayon, Quennec, Rallo, Santeix, Sebag, Sebillote, Secnazi, Sfez, Sciambri, Venga, Vinci, Zana et tant d’autres, le vivre ensemble était la référence. Avec une direction exemplaire du Dr Bédhu, De Varenne, Uzan, Lovy et une assistance amicale et personnelle de M. Georges Romanet (ami de M. A. Kaddour) les cours tunisiens avaient acquis une notoriété internationale. Les grands jockeys se produisaient sur la piste (Poincelet, Garcia, Massard, Laumain, Audon) et les grands noms de la mode se présentaient en Tribune (Torrente, Shciaparelli, Bonet)
À la veille de l’indépendance (1956) plusieurs éleveurs tunisiens participent avec succès aux différentes manifestations hippiques. À coté des élevages classiques de Abdelhafidh et Khoudir Kaddour, Moncef et Férid Baccouche, Mohamed, Abdelmajid et Moncef Essaied, Tawfik et Bechir Ben M’rad, on retrouvait Mohamed Salah Ben Hammouda, Abdelkader Bouziri, Mustapha Ben Abdallah, M’Hamed Djellouli, Béchir Ben Gobrane, Mohamed Ben Ammar, Habib Djemmali, Sadok Essaied, Farid Bouchoucha. Mohamed Zarrouk , Ahmed Ben Hassine, Hamadi Chamakh, Ahmed B. Sghaier, Houssine Ouchahi, Sadok Ben Nasr, Amara Ben Lachheb, Mohamed Soula, Hamadi Meddeb, Hedi Driss, Rachid Gharbi , Mounir Kébaili et bien d’autres.
Le décret du 13 juillet 1967 réorganisa une nouvelle fois la société des courses de Tunis et fit passer la société sous tutelle de l’Office de l’Elevage et des Pâturages exécuté par Abdesselem Ferchiou. Enfin le décret 1170 du 26 mai 1970 lui donnera sa forme actuelle. L’hippodrome de Kassar Said sera le théâtre de grandes manifestations hippiques, honoré à diverses occasions par la visite de chefs d’états, de chefs de diplomatie et de hauts responsables de plusieurs pays voisins et amis : Sa Majesté Mohamed VI, Mme Jacky Kennedy , Mme Jihane El-Sadate, Farid El-Atrache, Samia Gamal, Abdel Halim Hafez et Tino Rossi.
Hippodrome de Kassar Said : origines du nom
Les terres sur lesquelles fut édifié l’hippodrome font partie du domaine du Palais Kassar Said (actuellement Portal Hayder) . Grace à une donation foncière au franc symbolique de la part de la princesse Lella Hallouma Hayder née Bey l’Hippodrome de Kassar Said vit le jour entre 1992-1993 et les premières manifestations furent organisées à partir de 1894 en parallèle avec l’hippodrome de Mégrine. Le transfert de l’ensemble des activités hippiques s’opérera en 1905 avec une forte domination de courses militaires.
Le palais de Kassar Said était auparavant la propriété de “Ismail Essouni” Garde des sceaux ( Sahet Ettabaa) . Il fut acheté par Sadok Bey qui le baptisa” Al Kasr Essaid”. C’est ainsi que fut nommé l’hippodrome. Nous relatons ci après les sources retrouvées et consultées:
Mohamed Salah Mzali : l’hérédité dans la dynastie husseinite Maison Tunisienne de l’édition 1969
Il est noté à la page 44 et la page 45 (règne de Sadok Bey 22 novembre 1859/ 28 Octobre 1882). La Mehalla était alors commandée par Ali Bey frère du Souverain et du rebelle ( Adel Bey) ( p 44)
– Auparavant le BEY avait fait supprimer sans autre forme de procès un certain nombre de personnalités seulement suspectées de sympathie pour le prince rebelle. Parmi elles figuraient le général Rachid, commandant du contingent tunisien en Crimée et le Garde des Sceaux Ismail Essouni dont le palais de Kassar Said, confisqué et bientôt occupé sans vergogne par le souverain devait servir de cadre à la signature du traité du Bardo du 12 Mai 1881 (p 45)
2 – Abdelaziz Bey : Le vieux Kram édition cartaginoiseries mars 2015
Sidi Hayder (1817-1900) était Emir Oumara ministre du sceau et gendre de Ali Bey. Après son mariage avec Sidi Hayder , Dame Hallouma bent Ali Bey dont elle était la fille ainée, habitera son palais devenu Bortal Hayder. (p 37). Le Palais Bortal Hayder était à l’origine le palais de Kassar Said qui avait appartenu au général Ismail Essouni. Confisqué après sa condamnation c’est le Bey régnant Sadok Bey qui l’habitera. Il lui donna le nom de Kassar Said interdisant qu’on l’appelle autrement sous peine d’être puni (Mémoires manuscrites de Sadok ben Mustapha Bey B.N Tunis) p 38
Dame Hallouma devenue veuve en 1900 son fils Rachid Hayder épousa sa cousine maternelle la princesse Zbeida bent Mohamed El Hadi Bey (frère de Dame Hallouma) . Ayant besoin d’argent son frère Sidi Salah hypothèque le palais sans pouvoir rembourser à temps ses créanciers. Le bey Mohamed El Hedi informé se montra tout disposé à régler la somme à la seule condition du transfert de propriété au nom de sa fille Zbeida. P 38
3– Mémoires familiales
A la mort de Sadok Bey en 1181, c’est son frère Ali qui devient souverain. Ayant épousé Lella Kmar la femme de son défunt frère Sadok Bey il céda ce palais à sa fille Lella Hallouma épouse sidi Hayder et préféra éloigner sa jeune épouse des frasques du sérail. Il s’installa à La Marsa et construit Kobbet El Hawa. Sidi Hayder avait racheté le palais de Kassar Said et le baptisa Bortal Hayder. Il fut offert à son épouse Hallouma Bent Ali Bey .
Le transfert de propriété du palais au nom de la princesse Zbeida fut effectué en 1901 et célébra ainsi la naissance du prince Kheireddine (mon grand père) En juin 1963 la famille sera expulsée de son palais sans autre forme de justice et tous ses biens ainsi que l’ensemble des terrains expropriés. Le palais fut racheté par le ministère de l’éducation nationale (officiellement), laissé à l’abandon, pillé, saccagé. Repris par l’armée en 1975, il abrite aujourd’hui l’école d’état major.
Quant au palais qui abrite l’exposition et la maison des arts il a appartenu à la couronne (bien de l’état). Il était de coutume que le Bey habite ce palais durant la période printanière (Dar Erribia) et l’utilisait aussi pour s’accorder un moment de repos durant les journées de travail au palais du Bardo. Il servait aussi comme lieu d’habitat au besoin de travaux d’une demeure, d’un habitat provisoire. Ainsi il fut habité par Said Bey ( mon arrière grand père) lors des travaux dans sa demeure de la Manouba (actuellement la maison des retraités) ou encore à sidi Badreddine Hayder lors de ses noces avec lella Cherifa Bey. Seul le Bey régnant Sidi Mohamed El Hadi en fit sa demeure officielle qu’il partageait parfois avec son fils et conseiller le prince Tahar Bey
Durant le règne de Lamine Bey , le Dr Hamadi Ben Salem l’avait transformé en un hôpital pour les maladies respiratoires et baptisé « hôpital sidi Lamine Bey pour les maladies respiratoires ». Après l’indépendance il fut rebaptisé « hôpital Aboul Kacem Echebbi pour les maladies respiratoires »